LES PROBLEMES
ECOLOGIQUES DU BAÏKAL
Voilà un
sujet qui a fait couler beaucoup d'encre depuis de très nombreuses
années, car très vite les Russes ont pris conscience
de l'importance de la protection du Baïkal, de nombreuses espèces
y étant endémiques. Toutes les études scientifiques
menées par l'institut limnologique depuis sa création
et celles menées par un grand nombre de scientifiques passionnés
par le phénomène Baïkal ont permis sa protection.
A tel point qu'aujourd'hui le Baïkal fait partie des sites protégés
par l'Unesco comme patrimoine mondial. On peut aussi dire que ce lac
s'est auto protégé, par le relief montagneux de ses
côtes, qui n'a pas permis l'implantation de trop nombreuses
villes qui auraient pu le souiller à jamais. Pourtant il existe
certaines raisons d'être inquiet que nous allons évoquer
ici.
Les incendies
:
La taïga
pendant l'été peut être aussi aride qu'en milieu
méditerranéen ! Souvent des incendies apparaissent,
provoqués par la foudre ou par la nonchalance des autochtones,
qui allument de petits feus pour cuire leur nourriture et qui ne les
arrêtent pas rapidement. Les tessons de bouteilles jetés
au hasard sont aussi une cause d'incendies. Ces incendies sont rarement
maîtrisés car très peu de moyens sont disponibles
malgré une surveillance assez efficace des gardes des différentes
réserves.
Les incendies
tuent une forêt qui mettra beaucoup plus d'années que
chez nous à se reformer. Les incendies accélèrent
aussi l'érosion des terres. Je me souviens avoir vu une forêt
décimée vers Davcha, j'ai questionné mes amis
pensant que l'incendie était récent : la forêt
avait brûlé 30 ans auparavant.
Le barrage d'Irkoutsk
:
Il a été
construit dans les années 50 et a eu pour effet une montée
des eaux et un ravinement important des côtes. Le niveau des
eaux serait monté d'un mètre provoquant de gros dégâts
sur les lieux de reproduction des poissons, amenant même à
provoquer une diminution de la taille des Omouls. Des tonnes de débris
arrachés aux côtes furent noyés dans le lac mais
la dynamique lacustre les auraient depuis assimilés. Les mouvements
des vannes du barrage faisant évoluer le niveau du lac correspondraient
depuis peu aux normes saisonnières.
La population
autour du lac :
Même si
elle existe, on ne peut vraiment dire qu'il s'agit-là d'une
grande source de pollution. La population des côtes du lac est
d'au plus 100 000 personnes. Les villes les plus importantes étant
Baïkalk au sud Est, Severobaïkal au Nord Ouest et Sloudianka
au Sud. La plus grande celle du Nord ne comptant que 28 000 habitants.
Au total la population des rives du lac ne dépasse pas 100
000 personnes. Les touristes sont peu nombreux mais les étrangers
tout comme les russes devraient prendre conscience que jeter tous
leurs déchets après leur barbecue ou leur semaine de
camping, est une honte, phénomène régulièrement
observé autour de la petite mer et l'Ïle d'Olkhon.
La rivière
Selenga :
Cette rivière
est la plus grosse qui se jette dans le lac, la pollution qu'elle
entraîne est dûe essentiellement aux différentes
usines qui se trouve sur son parcours comme toutes celle de la capitale
de Bouriatie Oulan-Oude. L'usine la plus polluante est celle de constructions
aéronautiques qui employait 50 000 personnes au temps de l'Urss
! Cette usine ne possède pas de stations d'épuration
! La cimenterie et la cartonnerie des alentours d'Oulan-Oude posent
aussi de gros problème. De plus la pollution qui arrive dans
le Baïkal a tendance à remonter, à cause des courants
qui la poussent vers le nord. Des espèces animales sont touchées
par cette pollution comme l'Omoul typique du détroit de la
Selenga ou l'Esturgeon que l'on ne trouve quasiment plus. Le détroit
de la Selenga fait donc partie des gros problèmes du lac, qui
sont liés à des problèmes économiques
(épuration des eaux, emplois) aussi ils ne sont pas prêts
d'être réglés.
L'usine de cellulose
de Baïkalsk :
Voilà ce
que l'on pourrait appeler "le problème du Baïkal". Ses
rejets représentent 60% des eaux usées du bassin. Cette
usine a été créée pendant la guerre froide
pour fabriquer des matériaux pour les avions militaires. Avec
la fin de la guerre froide elle aurait dû perdre de son importance,
mais ce n'est pas le cas. Les écologistes ayant stigmatisé
la défense du lac autour du projet d'arrêt de cette usine,
elle représente aux yeux du monde le problème numéro
1 du lac.
Les besoins en
eau du lac était de 400 000 m cubes, ils ont été
ramenés à 200 000. Mais 70% de cette eau est rejetée
à 150 m de la côte par une canalisation. La liste de
produits nuisibles rejetés dans le lac est importante. Ce qui
est certain c'est que la toute petite ville de Baïkalske est
au 65e rang pour les rejets polluants en Russie, au même niveau
que des villes de 500 000 habitants. Par ailleurs cette usine rejette
aussi d'importantes substances nuisibles dans l'air ! Comme pour la
pollution de la rivière Selenga, les courants remontent la
pollution vers le nord et la transportent sur plus de 15 km ! Il est
important de noter que même si le combinat de papier rejette
des effluents depuis 30 ans le bassin central ne présente aucune
trace de pollution, c'est le gigantisme du Baïkal qui autorise
un tel phénomène !
Les problèmes
d'encéphalites :
C'est surtout
au printemps que les risques d'infection du virus encéphalique
généré par des piqûres de tics posent problème.
A partir du mois d'août les risques sont vraiment moindres.
Les Russes conservent généralement les tics qui les
auraient piqués pour les faire analyser à l'hôpital.
Aujourd'hui il existe des vaccins plus simples à utiliser que
les vaccins en injection d'autrefois. Ce sont des pilules à
prendre une à deux semaines avant d'aller dans la forêt,
elles peuvent être achetées à Irkoutsk dans toutes
les pharmacies. Il s'agit des tablettes de Remantadin 0;05g fabriquées
dans les pays baltes ou des tablettes de Jodontipyrini fabriquées
à Tomsk.
Ces dernières
seraient plus efficaces d'après les locaux. Si toutes ces données
sur l'état écologique du Baïkal sont impressionnantes,
il faut les relativiser, ce qui n'empêche pas de continuer de
clamer haut et fort que le Baïkal doit être protégé.
Comparée à la pollution de lacs d'autres pays, celle
du Baïkal est ridicule (les usines finlandaises rejetant à
elles seule 9,3 millions de tonnes de rejets, le Baïkal 0,3 et
ce sur un territoire beaucoup plus grand). Les 2 tiers nord du lac
sont dépourvus de pollution, l'eau y est quasiment partout
parfaite, ce n'est pas la population, inexistante, qui peut le polluer.
L'eau du lac est si bonne qu'on la met même en bouteille.
Les mesures de
protection prises par les Russes :
Toutes les volontés
de stopper les complexes industriels autour du lac doivent toutes
prendre en compte les problèmes de l'emploi, certaines usines
ont été reconverties vers des productions moins polluantes.
Des décrets ont été votés par les plus
hautes instances du pays pour stopper toutes les exploitations minières
et forestières qui pourraient nuire au lac. Les constructions
sur les rives sont très réglementées. Comme par
exemple l'arrêt du programme hôtelier de Listvyanka à
cause du non respect des normes de rejet d'eau.
L'usine de Baïkalsk
s'est vue doter de stations d'épuration, pas suffisantes certes
mais tout de même présentes. Le Baïkal a été
classé patrimoine protégé et des experts occidentaux
sont sur le qui vive. Les coupes de bois sont interdites sur 40 km
des rives vers l'intérieur des terres ! De très nombreux
parcs nationaux, réserves naturelles, ont été
décrétés depuis des années comme le plus
ancien celui de Bargouzine, en 1916.
Le personnel en charge de ces parcs est d'un grand dévouement
et malgré des difficultés dues au contexte économique
il se bat véritablement pour protéger ce lac. Les scientifiques
de l'institut Limnologique, malgré le peu de moyens financiers
dont ils disposent, malgré les salaires rarement ou même
pas payés continuent à travailler. Mais jusqu'où
ira leur courage. Institut Limnologique d'Irkoutsk http//www.lin.irk.ru
(site à partir de décembre 1998) Tout n'est pas parfait
sur le Baïkal mais beaucoup a déjà été
fait pour le préserver. Si cela ne semble pas assez c'est surtout
parce que ce lac est exceptionnel et qu'il est du devoir des hommes
de la protéger.
[Carte
des espaces protégés]